PORCHEVILLE (AFP) - Ils touchent un salaire, payent des impôts mais n'ont pas de carte d'électeur : considérés par la loi comme des SDF, les campeurs de Porcheville qui vivent pourtant toute l'année dans ce village des Yvelines, ont été radiés des listes électorales, le coup de grâce pour ces blessés de la vie.
"C'est une humiliation, une exclusion de plus", s'exclame Antoine Teresa, pompier chez PSA Citroën à Poissy (Yvelines), en brandissant le courrier qu'il a reçu le 10 janvier de la mairie de Porcheville. Radié des listes électorales. Motif : "Sans résidence, sans domicile fixe (caravane)".
Expulsé de son appartement de Chanteloup-les-Vignes (Yvelines) "pour raisons familiales", ce gros bonhomme de 52 ans a emménagé en juin 2005 au 43, camping des Myosotis, où il a acheté un abri de jardin qu'il a accolé à sa caravane.
"En 30 ans, communiste de coeur, je n'ai jamais manqué une élection : aujourd'hui, c'est la première fois que je suis propriétaire et on me traite de SDF. Vous en connaissez beaucoup vous des SDF qui ont leur fils inscrit à la maternelle du coin et qui payent 1.500 euros d'impôts par an ?" Devant son énorme téléviseur, il "ne perd pourtant pas une miette" de la campagne.
"Nos parents se sont battus sur les barricades pour ce droit. Partout on doit fermer sa gueule, le vote est notre dernière tribune légale, c'est une honte!", dit-il amer.
Le courrier de la mairie stipule qu'un recours était possible dans les dix jours après réception. Mais Antoine Teresa "bossait" de jour, de nuit, le délai est passé. "S'il faut aller au tribunal pour faire valoir un droit de naissance, c'est pas la peine!", s'indigne Raymonde, la gardienne du camping qui compte une quarantaine de mobile-home, caravanes et cabanes de bois, disposés le long de la voie ferrée.
Arrivée il y a onze ans avec ses trois enfants, cette mère célibataire a reçu "il y a bien longtemps" ce courrier d'incapacité électorale. "A 18 ans, je collais les affiches pour le PC, j'étais motivée mais là, après toutes les injustices que j'ai vues, j'ai laissé tomber: j'ai fini par devenir individualiste, c'est moche mais pour moi, voter aujourd'hui, c'est tourner en rond".
Une fois étiquetée SDF, Raymonde s'est sentie considérée comme "un parasite, une marginale" : "Je ne veux plus rien avoir à faire avec eux, moi je bosse, j'essaie d'aider au mieux les autres mais je ne veux plus me battre avec l'administration". Son voisin au physique d'épouvantail avec deux joues creusées et une paire de grands yeux bleus a lui aussi "perdu la foi" et est devenu apolitique.
"Parce que je suis campeur, je n'ai plus mon nom sur les listes électorales, une injustice de plus contre laquelle je capitule", confie François Delande, secouant la cendre de sa cigarette dans une boîte en plastique de taboulé. "Moi, j'irais voter ? Quand la justice m'a arraché mes filles, mon entreprise, mon travail et les étrangers, mes allocs ? Ici, les Français sont en voie de disparition et la patrie n'existe plus", lâche-t-il.
2007-03-14
22:08:24
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christophe7
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Politique et gouvernement
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